Le marché du cannabis est actuellement en pleine effervescence et, alors que les cultivateurs en apprennent chaque jour davantage sur leurs génétiques, une gamme importante de variétés sont désormais disponibles pour tous les goûts. Comme vous pouvez vous en douter, toutes les plantes de cannabis proviendront d’un ancêtre commun situé dans une région bien précise du globe. Selon les chercheurs d’une étude publiée dans la revue Vegetation History and Archaebotany’, celle-ci se trouverait sur les hauteurs des plateaux tibétains, à proximité du lac Qinghai, le plus grand lac salé de Chine.

Les scientifiques ont longtemps cherché l’origine du cannabis, ou du moins, la souche originelle de cette plante. La plupart des gens seront d’accord pour dire que le cannabis provient d’un région d’Asie centrale. Toutefois, les scientifiques n’étaient pas d’accord sur l’emplacement précis, mais une étude de pollen fossilisé semblerait bien avoir trouvé le lieu de naissance des premières espèces de cannabis.

Pour faire court, il est possible d’analyser les différentes génétiques jusqu’à remonter à une petite quantité de plantes originelles connues comme autochtones, ou encore landraces. Ce sont des variétés locales, des plantes isolées géographiquement n’ayant pas été croisées avec d’autres variétés de cannabis. Par ailleurs, elles seront généralement originaires de régions spécifiques, c’est pourquoi elles auront développé des qualités particulières lors de l’adaptation de la génétique à cet environnement unique. En localisant ces landraces, il est possible de dater les différentes espèces de cannabis et de comprendre comment elles sont passées d’un continent à un autre au cours des derniers millénaires.

L’utilisation d’une horloge moléculaire

Cette recherche n’est pas un procédé simple. Un groupe de plantes étroitement liées au cannabis, comme c’est le cas du houblon (humulus lupulus), partagent une forme de pollen similaire dans le registre fossile, ce qui complique la distinction entre les deux. En effet, le houblon peut être considéré comme un cousin germain du cannabis, puisque les deux plantes proviennent de la famille des cannabinacées. Mais c’est également une espèce dioïque, c’est-à-dire qu’elle possède des spécimens mâles et femelles.

En partant de là, John McPartland, de l’Université du Vermont, et ses collègues ont décidé d’aborder le problème sous une perspective différente et de réunir 155 études de pollen fossile tout en en utilisant d’autres comme référence pour trouver le genre du pollen. Les scientifiques se sont rendus compte que, sachant que le cannabis poussera généralement dans des champs à ciel ouvert et que le houblon se développera plutôt dans les bois, le pollen pourrait être classé en identifiant d’autres plantes poussant couramment avec elles. Ainsi, les chercheurs ont utilisé des plantes généralement présentes dans les champs à ciel ouvert, comme l’armoise commune (artemisia vulgaris), pour savoir si le pollen fossilisé était du cannabis.

En utilisant cette référence, les paléobotanistes sont en mesure d’utiliser une horloge moléculaire afin de dater par carbone 14 et de comprendre quand le cannabis et son espèce sœur, le houblon, ont été séparés de leur ancêtre commun. Et selon les données obtenues, ils considèrent que l'humulus lupulus et le Cannabis Sativa L. se sont séparés il y a 27,8 millions d’années, sachant que le pollen fossilisé le plus ancien identifié comme Cannabis Sativa L. date de 19,6 millions d’années.

« Nous fermons la brèche temporelle entre la date de divergence et le pollen le plus ancien, en datant l’apparition la plus ancienne de l’armoise », écrivait l’équipe dans son article. « Ces données convergent toutes vers les plateaux tibétains du Nord-ouest, c’est pourquoi nous en sommes arrivés à la conclusion qu’il s’agissait de l’origine du cannabis, à proximité du lac Qinghai, à 3200 mètres au-dessus du niveau de la mer ».

Le grand voyage du cannabis

L’équipe considère que le cannabis est resté pendant des millions années sur les hauts plateaux d’Asie centrale. À cette période, les plateaux tibétains auraient commencé à se transformer et à créer un environnement favorisant le développement des cannabinoïdes pour protéger la plante des rayons UV et des herbivores. Les deux étant des problèmes sur le plateau tibétain à grande altitude.

Les registres de pollen fossilisé indiquent également que le cannabis serait arrivé en Europe il y a 6 millions d’années. Plus ensuite, vers l’Est et la Chine, il y a 1,2 millions d’années. Après l’Holocène, une période chaude et humide, les bois ont remplacé les steppes et le cannabis s’est peu à peu retiré vers les petits espaces ouverts restants et habitables.

Dans ces zones restreintes et isolées, des populations distinctes de cannabis ont évolué différemment, en s’adaptant aux nouvelles conditions et donnant naissance à des variétés locales aux caractéristiques phénotypiques uniques. Ainsi, la première trace de pollen de cannabis non fossilisé serait apparue sur le sous-continent indien il y a plus de 32 000 ans, mais les plus anciennes preuves archéologiques de la plante ont été découvertes au Japon et remonteraient à 10 000 ans.

Bien que l’étude soit intrigante, il est difficile de prouver ces hypothèses d’une façon catégorique. Cette théorie est avant tout basée sur des végétaux ayant cohabité avec le cannabis, tels que l’armoise, c’est pourquoi les résultats pourraient être incorrect suite à une contamination croisée inconnue. Lorsque les hommes se sont installés dans le monde entier, le cannabis s’est répandu et est devenu facilement disponible à la culture. Grâce à toutes ses propriétés, textiles ou psychoactives, il est toujours cultivé actuellement.