La vague de légalisation du cannabis qui s’étend à travers les États-Unis suscite l’intérêt de grandes compagnies étrangères au secteur. Les mouvements de Monsanto, la multinationale controversée productrice de graines transgéniques, vers l’industrie du cannabis ont alerté les commerçants du secteur. Par ailleurs, les cigarettiers ont également commencé à déplacer leurs pions pour diversifier leur activité vers le si convoité marché du cannabis.

Au cours des dernières années, des rumeurs ont circulé disant que Monsanto, le plus grand producteur de graines transgéniques du monde, prévoyait de s’emparer de l’industrie du cannabis. La multinationale a déjà pris le pouvoir d’autres industries agricoles comme celle du maïs ou du soja, à travers l’ingénierie génétique

Bien qu’ils aient toujours nié leur intention d’entrer sur le marché du cannabis, il existe au sein du secteur cannabique américain une notable méfiance et une grande précaution face aux mouvements de Monsanto et de ses sociétés proches pour entrer dans l’activité OGM (organismes génétiquement modifiés) avec les graines de cannabis.

Il y a quelques mois, l’industrie cannabique a déclenché les alarmes lorsque le géant pharmaceutique Bayer a rendu officiel le rachat de Monsanto pour la somme exorbitante de 66 000 millions de dollars. Cette acquisition a renforcé le monopole de l’offre d’aliments, mais a également signifié un énorme élan pour les organismes génétiquement modifiés, où l’activité naissante de la vente légale de cannabis représente une juteuse niche de marché.

Selon le magazine « Big Buds », Monsanto et Scotts Miracle-Gro (une autre multinationale américaine de vente de graines) ont une « relation commerciale étroite » et planifient la façon d’entrer dans l’industrie du cannabis. D’ailleurs, Hawthorne Gardening, l’une des filiales de Scotts, a déjà racheté trois des principales sociétés de culture de cannabis aux États-Unis : General Hydroponics, Botanicare et Gavita. De plus, d’autres compagnies du secteur de l’hydroponie (un type de culture industrielle via des dissolutions minérales) ont également révélé des tentatives de rachat de la part de Hawthorne Gardening.

« Ils veulent passer au-dessus des magasins d’hydroponie. Lorsque nous leur avons dit que nous ne collaborerions pas avec eux, ils nous ont répondu : « Bon, alors nous pourrions racheter toute votre compagnie comme nous l’avons fait avec Gavita et ensuite faire ce que bon nous semble », a déclaré un représentant du secteur hydroponique. 

Jim Hagedorn, directeur exécutif de Scotts Miracle-Gro, a même déclaré qu’il prévoit « d’investir un demi-million dans l’activité du cannabis. Je n’ai jamais vu quelque chose d’aussi grand dans l’activité de la jardinerie ». Hagedorn a également investi dans des compagnies telles que Leaf, spécialisée dans la culture de cannabis dans des terrariums d’intérieur régulés électroniquement et accessibles à travers des smartphones.

Méfiance au sein du secteur légal du cannabis

Il est logique que Bayer, en tant que société mère, partage avec Monsanto des secrets qui aident à promouvoir une activité mutuelle, comme cela pourrait être le cas du cannabis. De nombreuses personnes dans l’industrie du cannabis ont été prévenues de cela, comme Michael Straumietis, fondateur et propriétaire d’Advanced Nutrients.

« Monsanto et Bayer partagent des informations sur la modification génétique des cultures. Bayer s’est d’ailleurs associé à GW Pharmaceuticals, société qui cultive avec son propre brevet génétique de cannabis. Il semble assez évident que Monsanto et Bayer cherchent à créer et à cultiver également leur propre cannabis transgénique », déclare Straumietis. 

Le discours de Straumietis révèle l’inquiétude des actuels vendeurs de cannabis face à la croissance potentielle du marché. « Des compagnies et des gens possédant des milliards de dollars savent que le cannabis est une plante dotée d’énormes propriétés médicinales. C’est pourquoi ils veulent nous voler nos plantes, nos graines et notre industrie, et il faut faire quelque chose pour les en empêcher », déclare le fondateur d’Advanced Nutrients.

L’industrie du tabac, également à l’affût

Face à la possibilité de la légalisation du cannabis au niveau fédéral aux États-Unis, nombreux sont les investisseurs et les secteurs voulant leur part du gâteau lorsque cela se produira. Et l’une des industries les mieux placées pour faire une entrée en puissance sur le marché du cannabis est celle du tabac.

Le fait que les fumeurs abandonnent peu à peu la cigarette et que, par conséquent, la demande baisse, a poussé le secteur cigarettier à diversifier son offre. Les vaporisateurs et les cigarettes électroniques étaient, pour le moment, le grand enjeu du secteur pour continuer à attirer des clients. Mais avec le marché du cannabis qui décolle dans de nombreuses régions, les mouvements au sein du secteur cigarettier ne se sont pas fait attendre.

Le géant britannique du tabac Imperial Brands a commencé sa stratégie de diversification de l’activité vers la culture de cannabis médical. Le recrutement du spécialiste Simon Langelier pour faire partie de la direction de la société a représenté une preuve manifeste de ses intentions.

Langelier, qui a travaillé pendant trente ans dans la compagnie de tabac concurrente Philip Morris, est également président de la société canadienne PharmaCielo, qui fournit des extraits d’huile de cannabis médical. Cette expérience pourrait être précieuse pour aider Imperial à profiter au maximum des opportunités de ce nouvel horizon légal qui s’ouvre dans le pays.

Dans un communiqué, le président d’Imperial, Mark Williamson, a indiqué que la société profiterait de l’expérience de Langelier pour le secteur du tabac et les « activités proches », bien qu’il n’ait pas officiellement confirmé l’entrée d’Imperial dans la vente commerciale de cannabis.

Imperial, qui, il y a un an et demi, a supprimé le mot « tabac » de sa dénomination de marque, a franchi une étape significative pour son secteur avec le recrutement de Langelier. Ainsi, les cigarettiers pourraient appliquer leur expérience en termes d’agriculture et de distribution massive de culture sur un autre type de plante qui promet de rapporter des millions si les pronostics se réalisent.

Une estimation de Cowen & Co. prévoit que les consommateurs pourraient dépenser environ 50 000 millions de dollars (43 900 millions d’euros) en cannabis légal au cours de cette décennie. Et si la législation continue de progresser, des économies agraires comme celle de l’État de Californie pourraient générer jusqu’à 5 000 millions de dollars (4 390 millions d’euros), selon une nouvelle étude du Centre des Problèmes Agricoles de l’Université de Californie.

Ce mouvement réaffirme l’intérêt du marché international, dans ce cas le marché britannique, pour l’avancée de la légalisation aux États-Unis. L’industrie du cannabis semble ne pas être à court de prétendants, c’est pourquoi il existe une grande inquiétude dans le secteur en voyant quelles sont les grandes compagnies qui se montrent intéressées et quelles sont leurs intentions.